Avec son vrai-faux documentaire retraçant les péripéties d’un militant désireux d’organiser la première « Marche des hommes noirs » à Paris, Jean-Pascal Zadi signe une comédie unique en son genre. Enchaînant les situations absurdes, les quiproquos et les malentendus qui dégénèrent parfois sérieusement, le réalisateur qui joue son propre (faux) rôle tente de convaincre ses interlocuteurs du bienfondé de sa démarche.
Afin de donner à cet « évènement historique » la place qu’il mérite, l’organisateur sollicite le soutien des personnalités de la « communauté noire de France ». Toutes, cependant, sont loin de partager son approche du projet ou sa conception d’une identité noire figée, statique et monolithique.
Loin de constituer un bloc uni, la communauté va au contraire se révéler composée d’une multitude d’identités, d’histoires, de parcours et de mémoires. Autant d’individus qui n’ont rien en commun, si ce n’est le fait d’être noir et encore tous ne se définissent pas ainsi. « Le Noir français n’est pas uniforme. Il ne vient pas obligatoirement de banlieue. Il y a des Noirs qui vivent dans la campagne. Il y a des Noirs qui vivent en Corse. Il y a des Noirs qui vivent en Normandie » précise le cinéaste qui sait de quoi il parle. Né de parents ivoiriens, Jean-Pascal Zadi grandit près de Caen, avant de « monter à Paris », et n’hésite pas à clamer sa fierté d’être Normand.
Doté d’un sens très particulier de la diplomatie, JP va parfois douloureusement prendre conscience du fossé régnant entre « frères », sans oublier ceux qui séparent les « sœurs », les maghrébins, juifs, asiatiques et blancs des noirs mais aussi de leur propre « communauté », terme qui finit par ne plus rien vouloir dire…
Dans ce film, coréalisé avec John Wax, Jean-Pascal Zadi accomplit la prouesse de s’en prendre aux clichés, sous couvert d’en grossir le trait de façon outrancière. L’acteur-réalisateur normand, d’origine ivoirien, parvient aussi à démontrer magistralement toute l’absurdité d’un militantisme, obstinément recroquevillé sur ses positions, ainsi que la stérilité de certains débats médiatico-politiques ou les dérives racistes des antiracistes, les préjugés des uns et des autres. Tout cela sans, bien sûr, oublier de faire rire. Si JP est, sans conteste, un anti-héros attachant, d’autres sont assurément beaucoup moins sympathiques. « Tout simplement noir » rassemble en effet une pléiade de « guests » incarnant leur propre rôle qui ne craignent ni le contre-emploi, ni le ridicule.
Derrière la comédie, « Tout simplement noir » pose avec finesse la question de l’identité et démonte avec plaisir préjugés et stéréotypes. Une démonstration par l’absurde bien plus subtile qu’il n’y parait.
Récompensé du meilleur espoir masculin, Jean-Pascal Zadi n’oublie pas de remercier, sur la scène des Césars, ceux qui l’ont précédé et «ont ouvert la brèche » comme l’acteur Isaach de Bankolé et la réalisatrice Euzhan Palcy dans les années 80 ou plus récemment Ladj Ly et Omar Sy. Le réalisateur précise que « Tout simplement noir », parle avant tout d’humanité, avant de rappeler l’inhumanité avec laquelle certaines personnes sont traités, évoquant affaires de violence policière, scandale pesticide aux Antilles et mépris pour l’histoire de l’esclavage.
Son discours engagé ne laisse personne indifférent dans la salle et agite une partie de la presse, le lendemain, prompte à évoquer la « controverse ». Certains médias, cristallisant les aspérités ou propos les plus saillants, omettent de préciser la conclusion du lauréat, inspirée d’une citation de Frantz Fanon. « Chaque génération doit trouver sa mission, l’accomplir ou la trahir » souligne JP Zadi avant de quitter la scène.
Synopsis
JP, un acteur raté de 40 ans, décide d’organiser la première grosse marche de contestation noire en France, mais ses rencontres, souvent burlesques, avec des personnalités influentes de la communauté et le soutien intéressé qu’il reçoit de Fary, le font osciller entre envie d’être sur le devant de la scène et véritable engagement militant…